INTERVIEW DE LA MINISTRE IVOIRIENNE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE, RAMATA LY-BAKAYOKO : « Il est important que nos programmes de recherche bénéficient d’un soutien financier pour répondre aux attentes »

Abidjan, le 15 décembre 2017- Lors d’une interview accordée au média français en ligne AEF Info, à l’issue du Side-event "recherche et innovation" le 11 décembre 2017 en France, la ministre ivoirienne de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Ramata Ly-Bakayoko a plaidé pour un soutien financier en faveur des programmes de recherches thématiques du CAMES (Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur). Le Side-event, qui s’est tenu en marge du « One Planet Summit » à Paris, a planché sur la création d’un Conseil Africain de la Recherche.

AEF : Qu’attendez-vous de la création d’un Conseil Africain de la Recherche ?


Ramata Ly-Bakayoko : Pour que nos recherches aient un réel impact sur la société, il est important que le financement soit mieux ciblé vers les problématiques d’environnement, de changement climatique, de sécurité alimentaire, de ressources en eau. Nous sommes déjà organisés au sein du Cames, fort de 19 pays et de plusieurs universités, avec 12 programmes thématiques de recherche sur l’agriculture, la santé, les technologies, le changement climatique. Il est important que ces programmes bénéficient d’un soutien financier pour répondre aux attentes. C’est la raison pour laquelle nous pensons que le modèle de l’ERC (Conseil européen de la recherche) nous permettrait de faire un bond en avant.


AEF : Sur quel plan ?


Ramata Ly-Bakayoko : Il s’agit de privilégier l’excellence scientifique et l’innovation. Les pairs vont évaluer les programmes de recherche et donner les financements pour permettre aux équipes de recherche de mener leurs travaux. De la même manière que l’Union européenne, nous pensons que l’Union africaine, qui a déjà des programmes, pourrait rassembler ceux-ci de façon cohérente au sein d’un Conseil Africain de la Recherche.


AEF : Avez-vous déjà des partenaires ?


Ramata Ly-Bakayoko : Ce séminaire de haut niveau m’a permis de prendre des contacts. Mais nous avons déjà l’appui de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), dont la division de la recherche et de l’enseignement nous a envoyé un message pour nous signifier son intérêt.


AEF : De quels financements disposez-vous ?


Ramata Ly-Bakayoko : Nous n’avons pas de financements pour le moment mais nous pensons que nous allons en obtenir. Si nous sommes organisés, si nous avons une visibilité, avec des programmes de recherche et des indicateurs bien précis à atteindre, cela va intéresser l’aide au développement et le secteur privé. Je vais donner un exemple : à l’université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan, nous avons mis en place, depuis quatre ans, un projet scientifique et d’innovation qui abrite des unités de recherche en biopesticides et en phytomédicaments, ainsi qu’un centre d’excellence sur le changement climatique et l’agriculture durable, un centre d’incubation pour accompagner les projets en innovation des étudiants et des innovateurs qui veulent monter des start-up. Après avoir ainsi démontré notre capacité à faire une unité de production de phytomédicaments et une unité de biopesticides, nous avons gagné l’appui de la Banque mondiale, du Cirad et de l’IRD. Si nous demandons que ce Conseil Africain de la Recherche prenne en compte les thématiques de recherche du Cames, déjà très avancées, cela permettra de capter des financements.


AEF : La ministre française de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Frédérique Vidal, a déclaré être prête à s’associer à la réflexion sur le Conseil. Qu’attendez-vous d’elle ?


Ramata Ly-Bakayoko : Nous attendons d’être mis en connexion avec l’ERC pour nous accompagner dans la mise en œuvre du Conseil Africain de la Recherche. Bien sûr, nous avons notre environnement et nos spécificités mais nous ne réinventons pas la roue.